Inauguration de la stèle (6 décembre 2017)
Nous avions évoqué l’an passé, le déplacement de la stèle, dite gauloise de Sainte-Anne de l’office de tourisme vers la nouvelle mairie dans l’attente d’une destination finale. Le texte qui suit raconte l’épopée de cette stèle itinérante qui fut le premier monument aux morts trégastellois , il y a plus de 2000 ans.
Nous sommes quelques siècles avant JC. Ce qui deviendra Trégastel est alors occupé par une tribu des Celtes Osismes. Les Osismes (peuple de l’ouest) occupent le Léon et le Trégor depuis quelques décennies. Ils ont leur capitale près de Carhaix qui s’appellera Vorgium du temps des Romains.Ce sont des marchands qui font aussi du commerce maritime. On trouvera ainsi à Ploumanac’h un important trésor.
Contrairement aux précédents armoricains qui enterraient leurs morts sous des allées couvertes appelées Lia (tombe) ou dolmen en breton moderne, les Osismes incinèrent les leurs. Pour marquer l’emplacement de leur champ cinéraire, ils érigent des stèles appelés peulven (pilier de pierre). La taille de celle de Trégastel et ses gravures prouvent que ce cimetière appartenait à un village important et prospère.
Reconstitution de l’emplacement initial de la stèle
Étrangement en 1947, le nouveau monument aux morts ressemblera volontairement ou inconsciemment à une stèle gauloise.
Placé devant le chaos de rochers qui deviendra plus tard Langastel, cette stèle restera ainsi pendant 2000 ans jusqu’au jour où Jean de Lannion, capitaine du ban et de l’arrière ban de Tréguier qui possède à Trégastel, le moulin à marée, la Grand’maison et le manoir de Kerougant décide de bâtir en 1635, une chapelle dédiée à Sainte-Anne pour la remercier de l’avoir soutenu dans ses combats contre les dernières bandes issues des guerres de religion.
Autour de la chapelle il y aura bientôt un nouveau cimetière et une croix toujours visible, offerte par la famille Keraudren en 1638. Nous ne savons pas ce que devient la stèle pendant le siècle suivant, mais le champ restera dans le parcellaire de 1819 comme Liors ar peulven (le jardin du pilier de pierre). Une ferme s’installera bientôt près de la chapelle et le fermier ou ses descendants auront la malencontreuse idée de fendre en deux la stèle restée dans les environs pour en faire l’entrée de leur ferme (aujourd’hui Ker nevez)
Des décennies plus tard, la nouvelle population sans doute plus curieuse s’inquiètera de l’origine de ces deux piliers. Le sénateur Huon de Pénanster qui vient de construire l’une des premières villégiatures à Ker Dahut les examine avec Paul Courcoux, architecte du Castel Saint-Anne, rachète les pierres au fermier, fait recoller les deux morceaux et place la stèle dans sa propriété en 1905 à la pointe du Coz Porzh.
En 1997 l’ARSSAT à la recherche des monuments archéologiques s’interroge sur l’histoire de cette stèle remarquable. Une rencontre a lieu sur le terrain avec les responsables de la société archéologique de Rennes, du département et de la municipalité de Trégastel, en présence de Michèle Le Brozec Présidente de l’ARSSAT. Des pourparlers avec les nouveaux propriétaires de la stèle débutent alors.
En 2003, le maire de Trégastel s’inquiétant de l’érosion de la stèle battue par les vents et les embruns accélère son rapatriement dans l’office de tourisme en offrant une réplique en résine au nouveau propriétaire de Ker Dahut.
Elle restera 10 ans dans cet emplacement, jusqu’à ce que le nouveau Maire Paul Droniou constatant son érosion derrière la vitrine de l’office et voulant gagner de la place dans ces locaux exigus décide de la mettre à l’abri avant de la positionner ailleurs.
Départ de la stèle de l’office de tourisme
Lorsque le Maire demandera l’avis de l’association Sites et patrimoine de Trégastel , celle-ci lui proposera en accord avec l’ARSSAT de la remettre à son emplacement d’origine près la chapelle. Interrogé à leur tour, les services de l’état souhaiteront la voir mise à l’abri compte-tenu de la valeur de ses dessins.
Le patio de la mairie a finalement été choisi car cet emplacement, également proche de la vitrine contenant les autres vestiges archéologiques de Trégastel remplissait toutes les conditions.
20 mois plus tard les services techniques ont réalisé la prouesse d’y ériger la stèle malgré l’exiguïté des lieux. Comme disait Mark Twain : ils ne savaient pas que c’était impossible alors ils l’ont fait.
Un chariot de transfert à quatre roues remplaçait les rondins de nos ancêtres
L’équipe des services de Perros et de Trégastel auteur de la prouesse technique
le Maire Paul Droniou avec Roger Le Doaré Président de Sites et patrimoine et Vice-président de l’ARSSAT et Monsieur Régis Huon de Penaster descendant du restaurateur de la stèle
Madame Liliane Le Gac présidente de l’ARSSAT assistait à cette inauguration qui s’inscrivait exactement dans les statuts de l’ARSSAT.
Les deux associations remercient la municipalité et les services communaux pour leur engagement à sauvegarder le patrimoine de Trégastel.