Depuis début 1977, en accord avec les Propriétaires du Château : M. et Mme de Rougé, et les Services du Ministère de la Culture, afin de diminuer le coût des travaux de consolidation du monument, l’ARSSAT, par son président Claude Cochard, propose bénévolement ses services pour déblayer les éboulis.

Voir état du château avant 1977.

Etat de la façade nord en 1977

Donc en 1977, la Direction Régionale des Bâtiments de France, en accord avec la Direction Nationale des Monuments Historiques, confie à l’ARSSAT les travaux de déblaiement et de nettoyage, avant intervention des entreprises de restauration qu’elles pilotent.

Début des travaux de la tour NO

De mai à octobre, un week-end sur deux, dix personnes de l’ARSSAT, et un groupe d’ étudiants américains qui viennent nous seconder avec leurs professeurs pendant 10 jours, débutent le nettoyage de la partie nord-ouest de la cour supérieure du château.

C’est à dire ce que l’on nomme les salles 2 et 3 et la tour NO.

Les bases de la grande cheminée de l’aula, salle 3, salle de réception à compter de l’an 1470, les deux fenêtres donnant sur le Léguer et leurs cousièges, les bases d’un petit escalier à vis conduisant aux étages de la tour par l’ouest, l’accès à la tour NO par une porte voûtée, commencent à ressortir de la terre qui les obstruait.

Des tessons de poterie, des carreaux de terre cuite, une pierre à aiguiser, un fragment de cloche en bronze, quelques pièces de monnaie sont mis à jour.

Les travaux dans cette partie continuent en 1978 où le vidage de la tour NO débute. Une cheminée avec une meurtrière, une latrine, sortent des éboulis.

En 1979, l’ARSSAT obtient le deuxième prix d’un concours organisé par la Caisse Nationale des Monuments Historiques, suite à une étude technique sommaire du château 15e. Cette bourse se monte à 2000 francs.

Etat de la salle 3 au début des travaux

Le vidage de la tour NO continue au cours de l’hiver, le nettoyage de la salle 3 aussi.

Les sols de tout cet ensemble apparaissent et l’on débute le vidage de la salle nord-est dite salle 7, dans laquelle apparaît le soubassement de la cheminée de la chambre seigneuriale du premier étage. Sort aussi de terre un mur arasé ancien devant la salle 3. Il sera découvert plus tard qu’il appartient à l’ancien château du début du 13e siècle.

A cette date, fin 1979, on compte que 200 à 250 personnes, encadrées par Claude Cochard, ont travaillé depuis 1977 à l’enlèvement, et au tri des déblais du NO.

En 1980, suite à l’autorisation délivrée par la Direction des Antiquités Historiques de Bretagne, nous continuons les fouilles de sauvetage. Patrick Wartel devient notre responsable des fouilles. Rappelons que tous les ans nous envoyons au service officiel, un rapport sur les travaux effectués par nos soins, avec naturellement copie aux propriétaires.

Donc cette année là nous relatons :

  • la découverte du seuil d’une grande entrée devant la salle 3.
  • le dégagement du mur est devant la chapelle et l’apparition du mur mitoyen avec la salle 4
  • dans la tour NE l’étayage provisoire mis en place par nos soins avant consolidation par l’entreprise responsable des travaux
  • un sondage dans la tour SE pour retrouver le niveau du sol d’origine
  • dans le châtelet, remise au jour du cheminement d’entrée, des rainures de la herse, des appuis de portes ; du système d’écoulement des eaux de ruissellement de la cour haute vers la douve d’entrée ; le dégagement du cachot situé sous l’entrée du châtelet.
  • le commencement des travaux de dégagement de la salle 8 (ronces, gros blocs, éboulis en surface).

Pendant ces premières années et jusqu’en 1981 un groupe de 15 universitaires américains venant de Boston, nous prête main forte pendant deux semaines en juin, permettant ainsi au chantier d’avancer rapidement dans de bonnes conditions.

1981 : début du déblaiement de la tour NE, longues heures de nettoyage de tessons de poterie, marquage, ensachage et entreposage.

1982 : présentation de 6 carreaux décorés dans le bulletin annuel de l’ARSSAT.

1984 : Mademoiselle Viviane Maillen, à cette date vice-présidente de l’ARSSAT, établit le rapport des fouilles effectuées sous sa direction, sur les espaces X et X’, dans la haute cour, devant l’escalier venant du défilement.

Découverte

1 – de murs arasés dans le prolongement de ceux des salles 6 et 6 bis, parallèles à 3 m au mur est de la salle 3, on trouvera, après coup, qu’il s’agit en fait des murs des bâtiments ouest du château du début 13

2 – d’un fragment de tête sculptée très fruste

3- d’une clé en fer.

4- d’un carreau décoré.

1985 : salle 2 : mise à jour de deux drains provenant de la salle 6bis, remise en état des sols dans la salle 7 et la tour NE, dégagement de la végétation dans la cour haute et la salle 3, de la meurtrière sud de la tour SE. Objets mis à jour : un gond, une clé, des clous, des morceaux de poteries et de dallage.

1986 : Comblement de la salle 2 pour protéger les drains. Nettoyage et mise à l’abri des cageots de tessons.

1987 : Réunion au château en juillet pour préparer une nouvelle tranche de travaux, avec les propriétaires et les Bâtiments de France. Michelle Le Brozec, présidente, représente l’ARSSAT.

1991 : Depuis 1986, nous avons un local dans le château, sous le chemin de ronde à droite en entrant. M. de Rougé nous demande de le transférer aux 3e et 4e étages de la tour d’Acigné : tour SE, dès que les travaux seront achevés vers l’été 1991. Le 3e serait réservé à l’exposition du meilleur matériel découvert dans le château, le 4e serait notre salle de travail et notre entrepôt. Naturellement nous acceptons et le déménagement se fera dès l’année suivante.

1992 : Dans le cadre de la campagne de restauration de la tour d’Acigné, le Service Régional d’Archéologie confie à l’ARSSAT, le déblaiement de la pile du pont-levis qui donnait accès à cet ensemble depuis la cour haute. Ces restes de pile sont enfouis dans un éboulis qui s’appuie contre la tour côté ouest. Les travaux ont débuté en février, avec l’aide de lycéens, puis se sont poursuivis en avril. 20 membres de l’ARSSAT se sont relayés par groupes de 4 à 8 pour mener à bien le chantier. Après déblaiement des blocs de pierre ayant servi pour les travaux de restauration, l’éboulis ancien, incliné à 45°, se présente sous forme de deux couches bien distinctes.

Couche supérieure : terre jaune et moellons de remplissage. Parmi eux le bas du montant gauche où pivote l’axe de la porte basculante d’accès à la tour, sculpté : personnage féminin sans tête, vis-à-vis de l’élément masculin toujours en place. Il sera aussitôt replacé par l’entreprise de maçonnerie, encore sur le terrain.

Couche inférieure : environ 70 cm d’épaisseur ; terre brun clair avec des éléments de tomettes épaisses de 5 cm, des morceaux d’ardoises et des cailloutis.

Après démontage de l’échafaudage nous avons enfin accès aux restes de la pile sur la quelle venait s’abattre le pont-levis, deux rangs de pierres de taille en gros appareillage.

1993 : Nouvelle autorisation de dégagement pour le reste de l’éboulis laissé en place en attente de consolidation du mur de la salle 9, et pour la période du 20 avril au 15 mai. Il restait 1,5 m en profondeur, 3 m en largeur et 1,3 m de hauteur contre la tour.

Une coupe de l’éboulis à hauteur de 0,9 m fait apparaître 6 couches différentes.

  • épaisseur 40 cm, terre végétale et blocs de pierre provenant du pignon nord.
  • épaisseur 10 cm, terre jaune et pierres au dessus d’un lit d’ardoises en limite inférieure
  • épaisseur 40 cm, terre jaune et rouge avec morceaux de tomettes, dans sa limite inférieure un lit de grands carreaux.
  • épaisseur 6 à 10 cm, terre cendreuse, matériaux céramiques et métalliques informes, bois brûlé.
  • épaisseur 18 à 20 cm, terre jaune et blocs de pierre avec quantité de matériel céramique, éléments de verreries, déchets osseux, déchets de coquillages, éléments métalliques sur une terre charbonneuse au niveau du sol de 10 cm d’épaisseur.

Les éléments métalliques identifiables ont été remis au laboratoire « Arc Antique » de Nantes, pour stabilisation.

Début du dégagement de l’éboulis

1994 : mise en route de l’exposition des objets au troisième étage de la tour d’Acigné. Elle sera tenue pendant les vacances d’été, par deux étudiants, membres de l’ARSSAT.

1995 : nous apportons notre concours au Service Archéologique Régional de Bretagne pour un sondage devant l’entrée de la basse-cour, sous l’ancien pont-levis. La pile sur laquelle le pont dormant et le tablier levant se retrouvaient est mise à jour. La faible profondeur possible pour l’eau, fait comprendre que l’ensemble n’était qu’ostentatoire, pas opérationnel.

1996 : Relevés topographiques ARSSAT, en mars et juin, dans les deux cours du château.

1997 : Evaluation de la prochaine tranche de travaux sous l’égide des Monuments Historiques avec la nouvelle architecte en chef : Mme Suzanne de Pontault et M. de Rougé. Les travaux de déblaiement et de nettoyage se poursuivent dans la bonne humeur.

Base de la pile du système d’accès à la tour

1998 : Comme chaque année, avant la saison touristique, nettoyage des secteurs en déblaie ment, remise en état de l’exposition, assistance aux réunions d’avancement des travaux. En fin d’année la consolidation de la tour S.E. est pratiquement terminée et l’entreprise va pouvoir commencer les travaux d’étanchéité du cellier sous la salle 3.

1999 : La voûte du cellier est faite de longs blocs de granodiorite de Bégard pesant chacun 350 kg. Du ciment liquide va étanchéifier l’ensemble, avant reconstitution d’un dallage au niveau de la cour haute. Le système d’accès au cellier par le haut est consolidé.

Les travaux de déblaiement de la salle 8 donnant accès au cellier vont pouvoir commencer : 140 m3 de terre et blocs de granite à trier par l’ARSSAT suite à l’effondrement de l’étage supérieur. Courage !

2000 : Dès le début du décapage de la salle 8 apparaissent un escalier étroit incrusté dans le mur est de la pièce, un soupirail côté haute cour. Les déblais sont évacués par la fenêtre de la salle 8, donnant sur l’extérieur du château, en utilisant le palan électrique laissé en place par l’entreprise. Merci l’Armoricaine de Travaux !

L’abaissement du niveau de l’éboulis laisse deviner une belle architecture donnant accès au cellier. Dans un souci de sécurité, la séparation de la pièce 8 avec la salle voûtée se fera sous la cheminée monumentale.

L’intervention va débuter le 25 mars avec l’aide d’une équipe de cinq stagiaires d’Etudes et Chantiers, financés par le Conseil Général pendant deux semaines. L’ARSSAT prend ensuite le relais tous les « week-end » en avril, mai, juin, juillet et de septembre à octobre, sous la direction de Patrick Wartel. Mobilier trouvé : pierres de taille : linteaux, jambages de porte, carreaux, fragments d’assiettes, trois pièces de monnaie.

De 2001 jusqu’en 2003 : déblaiement du châtelet ce qui permit de retrouver l’arc de voûte de sa tour est. Il fut réutilisé par l’entreprise Clec’h qui consolida cet ensemble. Déblaiement de l’intérieur du cellier et mise à jour des restes de la courtine du château 13e.

2003 : salle 8 mise à niveau du sol jusqu’à la couche d’affleurement de l’ancienne courtine. Cette salle était recouverte d’un plancher qui couvrait les fondations de l’ancienne tour sud-ouest du premier château de pierres partiellement détruit en 1395. Arrêt des travaux après inspection du Service Régional d’Archéologie. Il est prévu que l’entreprise Clec’h de Pleumeur-Bodou stabilise le sol de la salle en laissant une trace des structures anciennes découvertes par l’ARSSAT.

Châtelet : L’entreprise Clec’h remet en état les lieux afin de permettre les visites.

Basse-cour : mise en ordre des rejets de chantiers dans la douve du châtelet.

Lors du déblaiement de la salle 2, sous les drains, mise à jour à nouveau des restes du rempart ouest qui servit jusqu’en 1470.

Nous avons donc mis en évidence, pratiquement toute l’aile ouest et le châtelet du château primitif. On peut en déduire que ce dernier était de type philippien et que la tour d’Acigné a sans doute remplacé une tour maîtresse de cette forteresse.

De 2005 à 2007, les entreprises sont pratiquement absentes, seul le dallage de la salle 8 se poursuivra. L’ARSSAT entreprend le dégagement de l’aile est : salle 4, demi tour est et salle 9.

Dans la salle 4 qui a pu servir d’écurie en 1614, mise au jour de l’arrière d’un four à pain.

Dans la demi-tour, vidage des éboulis et mise à jour d’un passage entre la salle 4 et la salle 9. Dans cette dernière, déblaiement de la cheminée et de la gueule du four à pain.

Aile est du château, vue sur le four à pain

Le four à pain dans la salle 4

En 2007 : Convention signée entre le Conseil Général et la famille de Rougé, propriétaire du château. La convention a pour but de faire face à l’ampleur de la tâche de consolidation et de promotion de l’édifice. Deux années d’aménagement devraient permettre de rendre le site accessible aux personnes handicapées. Le pont-levis du châtelet devrait être remis en service pour établir la liaison praticable entre basse et haute cour. Une énorme campagne de restauration devrait permettre d’aménager la tour d’Acigné.

2010 : le 2 avril l’ARSSAT reçoit une lettre des propriétaires nous demandant d’arrêter nos travaux, de rendre les clés et tous les objets que nous avions trouvés dans le château et que nous conservions en lieux sûrs.

A cette date, 1650 m 3 de pierres et terre, ont été déblayés, déplacés, triés, par nos soins.

300 bénévoles différents ont œuvrés au cours des trente trois dernières années, consacrant des temps libres de week-end à la sauvegarde et l’entretien du monument.

Dans les temps forts de déblaiement : l’équivalent de 750 journées de travail par an, le reste du temps, un minimum de 100 jours/an.

En 33 ans l’addition est lourde :

7500 + 2300 = 9800 journées de travail ! Près de 50.000 heures de labeur pour des archéologues, amateurs, il est vrai ! A combien l’heure de travail ? Sans compter les achats annuels de matériels nécessaires aux travaux !

Après les 33 ans de travaux détaillés ci-dessus, effectués par des bénévoles passionnés, nous ne pouvons que regretter la décision unilatérale des propriétaires, sans aucune concertation préalable avec notre association et les autorités de tutelle.

Synthèse réalisée avec l’ensemble des archives et photos de l’ARSSAT par Claude Berger, Patrick Wartel, Thibault Turenne, Patrick de Tonquédec, Liliane Le Gac.